La Bataille de Sekigahara (Photo: Chris Glenn)

La Bataille de Sekigahara

L'impact du plus grand combat de samouraï sur le Japon

La Bataille de Sekigahara (Photo: Chris Glenn)
Elodie Pourrat   - 10分钟阅读时间

Employez le mot "samouraï" n'importe où dans le monde et l'on pensera immédiatement aux anciens guerriers japonais : des hommes à la bravoure, à la loyauté et à la détermination remarquables, avec des armes excellentes et les compétences pour les manier avec adresse. Les samouraïs sont reconnaissables instantanément et pourtant, alors que la plupart d'entre nous connait la Bataille de Waterloo et la Bataille de Gettysburg survenue lors de la Guerre Civile Américaine, rares sont ceux qui connaissent le plus grand affrontement samouraï de tous les temps ou ses conséquences.

Survenue à l'endroit où se trouve maintenant la Préfecture de Gifu et opposant l'Est et l'Ouest du Japon le 21 octobre 1600, la Bataille de Sekigahara est l'affrontement de samouraï le plus sanglant et dont l'issue a été la plus décisive de l'Histoire. Il s'agissait également d'un tournant pour l'Histoire du Japon, qui a ouvert la voie à 260 ans sous le gouvernement Tokugawa. Bien que les experts débattent sur le nombre de morts, quelque 30 000 samouraïs auraient perdu la vie au cours des sept heures d'affrontement.

Cette histoire est un canevas mêlant intrigue politique et récits de tensions et de loyautés de longue date.

Au milieu du XVIe siècle, après une longue période de guerre civile et d'agitation, le Japon fut placé sous l'autorité d'Oda Nobunaga, jusqu'à la trahison d'un général qui lui coûta la vie en 1582. Toyotomi Hideyoshi, un autre général, acheva le processus d'unification et instaura la paix dans le pays.

Le Château d'Ogaki
Le Château d'Ogaki (Photo: Chris Glenn)

Toutefois, Hideyoshi mourut en 1598 à l'âge de 63 ans, laissant son vaste empire à son héritier : son fils de cinq ans. Afin de maintenir la paix et la stabilité du règne de son fils jusqu'à ce qu'il soit en âge de gouverner, Hideyoshi avait choisi un conseil composé des cinq daimyo (seigneurs de guerre) les plus influents et les plus puissants. Cependant, une lutte pour le pouvoir éclata rapidement entre les seigneurs loyaux envers le clan Toyotomi et ceux qui étaient fidèles au dirigeant du conseil, Tokugawa Ieyasu.

Ieyasu entreprit des démarches machiavéliques qui provoquèrent l'indignation d'un certain nombre de ses contemporains et bientôt, le pays entier est divisé en deux grandes armées : l'Armée de l'Est, et celle de l'Ouest.

Ishida Mitsunari, un homme qui fut le confident de Toyotomi Hideyoshi pendant longtemps et qui a élevé sa condition non pas par ses prouesses martiales mais par ses compétences en cérémonie du thé, était à la tête de la cause défendue par l'Armée de l'Ouest. Impétueux et zélé, Ishida rassembla la force de 130 000 samouraïs alors que Tokugawa n'en commandait que 80 000.

Les deux camps s'empressèrent de prendre des grandes routes et des châteaux vitaux sur le plan stratégique. Quand les forces de l'Ouest empiétèrent sur les territoires de l'Est en atteignant le Château d'Ogaki (Préfecture de Gifu), elles furent surprises par la vitesse à laquelle les forces de l'Est ripostèrent. Dissimulé à l'intérieur d'Ogaki, le chef de l'Armée de l'Ouest Ishida Mitsunari maintenait fermement sa position.

Sekigahara
Sekigahara (Photo: Chris Glenn)

Préférant les affrontements sur des champs de bataille, Tokugawa Ieyasu échafauda un plan afin de chasser les armées de l'Ouest d'Ogaki. Réalisant qu'organiser un siège ou inonder le château situé en basse altitude en construisant un barrage retenant les fleuves de la région serait coûteux et long, il imagina une manière plus simple et moins onéreuse de mettre fin au siège. Ieyasu répandit parmi les espions la rumeur que son plan était d'abandonner l'armée de l'Ouest à l'intérieur d'Ogaki et de se rendre à l'Ouest en passant par Sekigahara pour rejoindre les alentours du Château de Sawayama, dans le fief d'Ishida Mitsunari. Son prétendu plan était d'attaquer et de détruire le château avant d'avancer vers Osaka afin de mettre la main sur le fief de Toyotomi.

Ishida Mitsunari fut scandalisé par ce plan.

Le 20 octobre, dans l'obscurité d'une nuit pluvieuse, les forces de l'Ouest quittèrent le Château d'Ogaki et marchèrent 14 kilomètres dans la pluie et la boue jusqu'à Sekigahara, où ils installèrent en toute hâte leurs campements ainsi que des fortifications rudimentaires. Derrière eux, les armées de l'Est étaient proches.

Au cours de l'ère Meiji, le Général Jacob Meckel, un conseiller militaire allemand du gouvernement Meiji, étudia les cartes du champ de bataille de Sekigahara et diverses formations militaires. Il en déduit qu'en raison de leur avantage numérique et de meilleures positions sur un terrain surélevé, les forces de l'Ouest auraient dû l'emporter sur l'Armée de l'Est en les encerclant.

Une simulation de combat de samouraï
Une simulation de combat de samouraï (Photo: Chris Glenn)

Il avait tort.

Aux alentours de 7h30, quand la brume se leva, les armées ennemies réalisèrent à quel point elles se trouvaient proches l'une de l'autre. La bataille débuta vers 8h, quand un petit groupe de samouraïs à cheval sous le commandement de Ii Neomasa et de son gendre, Matsudaira Tadayoshi (qui était aussi le quatrième fils de Tokugawa Ieyasu) frappa la majeure partie des groupes de l'Ouest, les forces d'Ukita. Cela déclencha l'affrontement et la brume fut bientôt remplacée par la fumée accompagnant les coups de fusil.

Cet affrontement violent tourna d'abord à l'avantage des troupes de l'Ouest, qui repoussaient les charges des forces de l'Est à maintes reprises, au point que Tokugawa Ieyasu, qui avait tout d'abord établi son poste de commandement sur le Mont Momokubari à environ 2 kilomètres des affrontements, dû lui-même avancer jusqu'à la zone centrale, à seulement 800m au Sud de la base de son rival Ishida Mitsunari, située sur le Mont Sasao. Ce déplacement encouragea ses propres alliées et son avancement vers les lignes ennemies généra également de la peur parmi les troupes de l'Ouest.

Le moral des forces de l'Ouest chuta d'autant plus quand on comprit que l'important groupe composé des alliés de l'Ouest, les troupes Mori situées sur le Mont Nangu (soit à l'Est du champ de bataille et derrière les forces d'Ieyasu), ne participerait pas à la bataille. Il s'avéra que le chef des forces de Mori, Kikkawa Hiroie, avait conclu un pacte avec Tokugawa impliquant qu'il ne prendrait pas part aux affrontements avant le début des hostilités, dans l'espoir de préserver le clan Mori et ses biens. De même, une grande armée située au sommet du Mont Matsuo et sous le contrôle du neveu de Toyotomi Hideyoshi ne se joignit pas au combat.

Malgré leur avantage numérique et leurs excellentes formations de combat, les forces qui restaient fidèles à l'Ouest furent vaincues lorsque Kobayakawa Hideaki entra dans la bataille vers midi. Plutôt que de s'en prendre aux forces de Tokugawa, elles firent volte-face pour charger les armées de l'Ouest. Une à une, leurs défenses furent anéanties.

Des samouraïs en armure
Des samouraïs en armure (Photo: Chris Glenn)

Le combat ne dura que sept heures mais causa la mort de milliers de samouraïs et l'anéantissement de nombreuses familles nobles. Tokugawa Ieyasu se proclama vainqueur et fut nommé Shogun deux ans plus tard, ce qui ouvrit le pas à 260 années relativement paisibles, durant lesquelles la culture japonais fut davantage développée et parfaite.

Le champ de bataille de Sekigahara est un lieu touristique populaire, nous rappelant que l'affrontement en question a eu lieu il y a 400 ans seulement, et qu'il s'agit d'un des champs de bataille les mieux préservés parmi les nombreux champs de bataille que le Japon recense. Les postes de commandes des différents chefs de guerre sont indiqués par des drapeaux et des stèles commémoratives. Des plans détaillés et des guides contribuent à rendre la visite aux alentours des champs de bataille de Sekigahara d'autant plus appréciable et instructif. Cet endroit formidable figure fièrement au Top Trois Mondial des Champs de Bataille.

Elodie Pourrat

Elodie Pourrat @elodie.pourrat

Ayant baigné dans la japanime depuis l'enfance, mon intérêt pour la culture Japonaise s'est largement étendu au fil des années. Ayant suivi des études de Japonais et d'Anglais et effectué un voyage à Tokyo et dans sa région en 2017, c'est avec beaucoup de plaisir que je traduis les articles de Ja...